Développements usuels

Nous allons passer en revue quelques développements classiques, que vous connaissez probablement déjà depuis le chapitre sur les développements limités. Nous ne nous préoccuperons pas toujours de la détermination du rayon de convergence, que nous laissons au lecteur à titre d'exercice : il vaut $ 1$ pour $ (1+z)^\alpha$ et ses avatars, $ +\infty$ pour $ \exp(z)$ et ses avatars, etc. Le calcul des dérivées successives en 0 est rarement le moyen le plus simple de calculer un développement en série entière. Une exception notable est $ (1+z)^\alpha$, où $ \alpha$ est un réel quelconque. Si $ f(z)=(1+z)^\alpha$, les dérivées successives de $ f$ sont :
$\displaystyle f'(z)$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \alpha(1+z)^{\alpha-1}$  
$\displaystyle f''(z)$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \alpha(\alpha-1)(1+z)^{\alpha-2}$  
    $\displaystyle \vdots$  
$\displaystyle f^{(n)}(z)$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \alpha(\alpha-1)\cdots(\alpha-n+1)(1+z)^{\alpha-n}\;.$  

On obtient donc :

$\displaystyle (1+z)^\alpha= 1+\alpha z+\frac{\alpha(\alpha-1)}{2!} z^2+\cdots
+\frac{\alpha(\alpha-1)\cdots(\alpha-n+1)}{n!} z^n+\cdots
$

Dans le cas particulier où $ \alpha$ est un entier positif, les dérivées successives sont nulles à partir d'un certain rang, puisque $ (1+z)^\alpha$ est un polynôme. Dans ce cas, le développement se réduit à la formule du binôme de Newton que vous connaissez déjà. Les autres cas particuliers fréquemment rencontrés sont $ \alpha=\frac{1}{2}$, $ \alpha=-\frac{1}{2}$ et ceux où $ \alpha$ est un entier négatif.
$\displaystyle \displaystyle{ \sqrt{1+z}}$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \displaystyle{ 1+\frac{1}{2} z-\frac{1}{8} z^2+\cdots
+\frac{(-1)^{n-1}1.3.5\ldots(2n-3)}{2^{n}(n!)} z^n+\cdots}$  
$\displaystyle \displaystyle{ \frac{1}{\sqrt{1+z}}}$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \displaystyle{
1-\frac{1}{2} z+\frac{3}{8} z^2+\cdots
+\frac{(-1)^{n}1.3.5\ldots(2n-1)}{2^{n}(n!)} z^n+\cdots
}$  
$\displaystyle \displaystyle{ \frac{1}{(1+z)^k}}$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \displaystyle{ 1-k z+\frac{k(k+1)}{2} z^2+\cdots
+\frac{(-1)^nk(k+1)\cdots(k+n-1)}{n!} z^n+\cdots}$  

Du développement de $ \frac{1}{\sqrt{1+z}}$, on déduit celui de $ \frac{1}{\sqrt{1-z^2}}$, en remplaçant $ z$ par $ -z^2$. La primitive de $ \frac{1}{\sqrt{1-z^2}}$ nulle en 0 est $ \arcsin(z)$.
$\displaystyle \displaystyle{ \frac{1}{\sqrt{1-z^2}}}$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \displaystyle{
1+\frac{1}{2} z^2+\frac{3}{8} z^4+\cdots
+\frac{(2n)!}{2^{2n}(n!)^2} z^{2n}+\cdots}$  
$\displaystyle \arcsin(z)$ $\displaystyle =$ $\displaystyle \displaystyle{
z+\frac{1}{6} z^3+\frac{3}{40} z^5+\cdots
+\frac{(2n)!}{2^{2n}(n!)^2(2n+1)} z^{2n+1}+\cdots}$  

Les principales techniques de calcul de développement en série entière sont d'une part les combinaisons linéaires et les changements de variables, d'autre part la dérivation et l'intégration. Par exemple, à partir de la série exponentielle, on obtient les développements de $ \mathrm{e}^{-z}$, $ \mathrm{e}^{\mathrm{i}z}$, $ \mathrm{e}^{-\mathrm{i}z}$, puis ceux des sinus et cosinus usuels et hyperboliques grâce aux formules d'Euler, que nous rappelons.

$ \displaystyle{\sin(z) = \frac{\exp(\mathrm{i}z)-\exp(-\mathrm{i}z)}{2\mathrm{i}}}$ $ \displaystyle{\cos(z) = \frac{\exp(\mathrm{i}z)+\exp(-\mathrm{i}z)}{2}}$
$ \displaystyle{\sinh(z) = \frac{\exp(z)-\exp(-z)}{2}}$ $ \displaystyle{\cosh(z) = \frac{\exp(z)+\exp(-z)}{2}}$

\begin{displaymath}
\begin{array}{lcl}
\exp(z)&=&\displaystyle{
1+z+\frac{z^2}{2...
...{3!}+
\cdots+\frac{(-1)^nz^{2n+1}}{(2n+1)!}+\cdots}
\end{array}\end{displaymath}

Tous les développements en série des fractions rationnelles et de leurs primitives peuvent s'obtenir à partir de la série géométrique. Considérons une fraction rationnelle du type $ P(z)/Q(z)$, où $ P$ et $ Q$ sont deux polynômes, supposés premiers entre eux (fraction irréductible). Les pôles de la fraction sont les complexes qui annulent le dénominateur.

Proposition 5   Soit $ P(z)/Q(z)$ une fraction rationnelle, telle que $ Q(0)\neq
0$. Elle est développable en série entière sur $ ]\!-\!R,R [$, où $ R$ est le plus petit module d'un pôle.

$\displaystyle R = \min\{ \vert z\vert ,\;z\in\mathbb{C} ,\;Q(z)=0\}\;.
$

Par exemple, bien qu'elle soit définie sur tout $ \mathbb{R}$, la fraction $ \frac{1}{1+z^2}$ n'est développable en série entière que sur $ ]\!-\!1,1 [$, car ses pôles sont $ \mathrm{i}$ et $ -\mathrm{i}$. Démonstration : Donner cette démonstration nous permettra de détailler une technique générale de calcul du développement en série des fractions rationnelles. Observons tout d'abord que si 0 est un pôle, alors la fraction n'est pas définie en 0, elle ne peut donc pas être développable sur un intervalle contenant 0.

La première étape consiste à décomposer la fraction en éléments simples. La partie entière est un polynôme, qui modifiera éventuellement les premiers termes de la série. Pour les besoins de la démonstration, nous utiliserons la décomposition dans $ \mathbb{C}$, qui ne contient que des éléments simples du type $ \frac{1}{(z-\rho)^k}$, où $ \rho$ désigne un pôle. On écrit alors :

$\displaystyle \frac{1}{(z-\rho)^k} = \frac{(-\rho)^{-k}}
{\left(1-\frac{z}{\rho}\right)^k}\;.
$

Or $ \frac{1}{(1-z)^k}$ est développable en série entière sur $ ]\!-\!1,1 [$.

$\displaystyle \frac{1}{(1-z)^k}
= 1+k z+\frac{k(k+1)}{2!} z^2+\cdots
+\frac{k(k+1)\cdots(k+n-1)}{n!} z^n+\cdots
$

En remplaçant $ z$ par $ \frac{z}{\rho}$, on obtient pour tout $ z\in]\!-\!\vert\rho\vert,\vert\rho\vert [$,

$\displaystyle \frac{1}{(z-\rho)^k}
=
(-\rho)^{-k}\left(1+k \frac{z}{\rho}+\f...
...o^2}
+\cdots
+\frac{k(k+1)\cdots(k+n-1)}{n!} \frac{z^n}{\rho^n}+\cdots\right)
$

Comme la fraction rationnelle est combinaison linéaire d'éléments simples, le résultat de la proposition se déduit du théorème 3.$ \square$ Voici un exemple détaillé.

$\displaystyle \frac{z^3}{z^2+z-2} = -1+z+\frac{\frac{1}{3}}{z-1}+
\frac{\frac{8}{3}}{z+2}\;.
$

Cette fraction a deux pôles, $ 1$ et $ -\!2$. Elle est développable en série entière sur $ ]\!-\!1,1 [$. Nous devons calculer séparément les développements des éléments simples.

\begin{displaymath}
\begin{array}{lcl}
\displaystyle{
\frac{\frac{1}{3}}{z-1}}&=...
...2}{(-2)^2}+\cdots+\frac{z^n}{(-2)^n}+\cdots\right)}
\end{array}\end{displaymath}

En ajoutant les deux séries, et en tenant compte de la partie entière pour les deux premiers termes, on obtient :

$\displaystyle \frac{z^3}{z^2+z-2} = 0+0 z+0 z^2-\frac{1}{2}z^3+\cdots
+\left(-\frac{1}{3}+\frac{(-2)^{2-n}}{3}\right) z^n+\cdots
$

Evidemment on pouvait prévoir que les premiers termes seraient nuls et développer $ \frac{1}{z^2+z-2}$, puis décaler la série obtenue en remplaçant $ z^n$ par $ z^{n+3}$. Le lecteur vérifiera que le résultat est bien le même.

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