Nous reprenons les notations de la section précédente : et
sont deux espaces vectoriels, munis respectivement des bases
et
. La matrice de l'application
linéaire relative à ces deux bases est . Le noyau
de est l'ensemble des vecteurs de dont l'image par est le
vecteur nul. Soit un vecteur de et
le
-uplet de ses coordonnées dans la base
.
La condition nécessaire et suffisante sur pour que soit nul
est que toutes les coordonnées de , c'est-à-dire
toutes les lignes du produit , soient nulles.
Le système linéaire est homogène : l'ensemble de ses
solutions est un sous-espace vectoriel de
. La méthode du
pivot de Gauss permet de déterminer une base de l'ensemble des
solutions de , donc une base de
. Nous allons voir
qu'elle permet aussi au passage de déterminer le rang de ,
et même une base de
.
D'après la proposition 8, à toute famille de
vecteurs de
correspond une application linéaire de
dans
. Nous avons vu que le rang de cette application
est le rang de la famille de vecteurs
(définitions 10 et
14). La
technique décrite ici s'applique indifféremment à une famille
de vecteurs ou à une application linéaire.
La première étape de la méthode de Gauss consiste à mettre le
système sous forme échelonnée.
Mettre le système sous forme échelonnée, c'est
passer de à par des transformations de lignes
consistant à ajouter à une ligne le produit d'une autre par une
constante, échanger deux lignes,
permuter éventuellement des
coordonnées, de sorte que
- les systèmes et sont équivalents,
- les inconnues
de sont celles de ,
mais dans un ordre qui peut être différent,
- les pivots
sont tous non nuls.
Au système on peut associer la matrice suivante.
Cette matrice est celle d'une autre application linéaire , de
vers .
Théorème 13
Les applications et sont de rang .
-
est une base de
- Soient
les indices tels que
.
est une base de
.
Démonstration : La famille
engendre
, car
engendre . Or tous ces vecteurs appartiennent
au sous-espace de , engendré par
. Donc
est de dimension au plus . Pour montrer que
le rang de est et que
est une
base de
, il suffit de vérifier que c'est une famille
libre. Nous devons montrer
Utilisant les coordonnées dans la base
, les
doivent vérifier le système :
Nous devons montrer que ce système a pour unique solution
. C'est une récurrence facile sur
. Si , le système se réduit à l'équation
, qui a pour seule solution , car le
pivot est non nul. Supposons le résultat vrai pour tout
système du même type, de taille , et considérons
la dernière équation du
système de taille . Si elle est satisfaite, alors ,
car le pivot est non nul. En reportant dans les
équations précédentes, on obtient un système du même type,
mais de taille : la seule solution est
, par
l'hypothèse de récurrence.
Les deux systèmes et ayant le même ensemble de
solutions, les applications et ont le même noyau, et donc
le même rang, d'après le théorème du rang 12. La
dimension de
est donc . Pour montrer qu'un ensemble
de vecteurs est une base, il suffit de vérifier que c'est une
famille libre. Inutile d'écrire le système en
qui exprime que
: il se déduit de
en annulant les variables autres que
. La
chaîne de tranformations qui conduit de à conduit
forcément de ce nouveau système,
au système ci-dessus. Les deux systèmes ont le même
ensemble de solutions, d'où le résultat.
La technique est beaucoup plus facile à appliquer qu'il n'y paraît.
Considérons l'application suivante, de
dans
:
Sa matrice, relative aux bases canoniques de
au départ, et
à l'arrivée est :
Le système homogène permettant de déterminer
est :
Le système est de rang 2, il en est de même de l'application
. La mise sous forme échelonnée montre que les colonnes de
correspondant aux variables et , à savoir la première et la
troisième, forment une famille libre, donc une base de
.
Nous avons écrit les vecteurs en colonnes, pour souligner le fait
qu'il s'agit nécessairement de vecteurs colonnes de la matrice .
Pour trouver une base de
, il faut continuer la
résolution.
L'ensemble des solutions est l'ensemble des quadruplets
, où et sont deux réels quelconques.
Donc :
C'est un sous-espace de dimension 2 dans
.
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