Définition 1On appelle série entière une série du type
où
est une suite de réels ou de complexes, et
désigne une variable complexe. La somme est la fonction qui
à tout complexe tel que
converge, associe
Les deux exemples de base de séries entières sont la série
géométrique et la série exponentielle.
Nous verrons par la suite que beaucoup de séries usuelles se
ramènent à l'une ou à l'autre.
Série géométrique :
Série exponentielle :
Le calcul de la somme de la série géométrique est facile,
grâce à l'expression
explicite des sommes partielles. Le fait que la somme de la série
exponentielle soit n'est pas évident. Deux
points de vue sont possibles.
Après avoir démontré que la série converge pour tout , on
peut définir l'exponentielle complexe comme la somme de cette
série. À partir des résultats sur les séries entières que nous
allons établir, on peut alors démontrer toutes les propriétés
classiques de l'exponentielle.
Il existe d'autres définitions de l'exponentielle. On peut
par exemple la définir sur
comme la fonction
inverse du logarithme népérien, qui lui-même est défini comme
la primitive de
qui s'annule en ; on étend ensuite
la définition à
tout entier.
On peut alors démontrer que est la
somme de la série exponentielle.
Étant donnée une série entière
, la première
question est celle de son domaine de convergence, à savoir
l'ensemble des complexes tels que la série converge. On utilise
pour cela le théorème suivant qui exprime une propriété très
particulière d'une série entière, liée aux disques du
plan complexe centrés en 0. Si est un réel positif,
on note le disque ouvert de centre 0 et de rayon .
Théorème 1Soit un réel strictement positif. S'il existe tel que pour tout , alors pour tout , la série entière
est absolument convergente.
Deux possibilités existent donc :
soit
est borné, et la série
converge sur , soit
n'est pas borné. Rappelons que
le terme général d'une série convergente tend vers 0. Donc
si
est borné, alors
tend vers 0 pour tout , et en particulier
est aussi borné.
Démonstration : Écrivons :
Si ,
et la série
converge. D'où le résultat
par le théorème de comparaison des séries.
Définition 2On appelle rayon de convergence de la série entière
le réel défini par :
est bornée
Le disque est appelé disque de convergence de la série
entière
.
Rappelons que toute partie majorée de
admet une borne
supérieure finie, et que par convention, la borne supérieure d'une
partie non majorée est .
Le disque de convergence est le plus grand
disque (ouvert) tel que
converge à l'intérieur de ce disque. Par
définition de la borne supérieure, si , la suite
n'est pas bornée, elle ne peut donc pas tendre vers
0 : si , la série
diverge (voir figure
1). Nous
n'étudierons pas en détail ce qui
se passe pour , car la situation est compliquée : tous les cas
sont possibles. En voici un exemple. Pour tout réel
, la série
a pour rayon de convergence . En effet
tend vers
0 pour , vers pour . La série entière
converge pour , diverge pour
. Considérons maintenant un nombre complexe de module :
.
Si
, la série
diverge.
Si , la série
est absolument convergente.
Si
, la série
est convergente pour
,
mais pas absolument convergente. Pour , la série
diverge.
Figure 1:
Disque de convergence d'une série entière.
Le rayon de convergence de la série exponentielle est infini,
puisque pour tout
,
tend vers 0. Par
contre, le rayon de convergence de la série
est nul,
puisque pour tout , tend vers l'infini. Comme autre cas
particulier, si la suite est nulle au-delà du rang , alors
est un polynôme de degré , qui est
défini pour tout . C'est une série de rayon de convergence infini.
Le rayon de convergence de la série
est lié aux
coefficients de la façon suivante.
Théorème 2Le rayon de convergence de la série entière
est
tel que :
Démonstration : Pour éviter les cas particuliers nous supposons que est
strictement positif et fini. Les cas et se traitent
de la même manière, avec la convention
.
Examinons la suite
dans les deux cas et .
:
Dans ce cas la suite
tend vers 0, puisque la série
est absolument convergente. Donc il existe tel que
pour tout ,
. Or :
Mais si tous les
au-delà de sont inférieurs à
, alors
. Comme
ceci est vrai pour tout , on en déduit :
:
Dans ce cas la suite
n'est pas bornée, par
définition de . Donc pour tout , il existe tel que
. Or :
Mais si une infinité parmi les
sont supérieurs à
, alors
. Comme
ceci est vrai pour tout , on en déduit :
Le théorème 2
rappelle évidemment le critère de
Cauchy. Or le critère de d'Alembert est plus facile à
appliquer en général. Pour toutes les séries que l'on
rencontrera en pratique, le corollaire suivant suffit à
déterminer le rayon de convergence.
Corollaire 1Soit une suite telle que
converge. Le rayon de convergence de la série entière
est tel que :
Ce résultat vaut aussi pour et , toujours avec la
convention
. Il s'applique aux exemples que nous
avons traités jusqu'ici :
,
et
.
Démonstration : Il existe une relation entre les critères de Cauchy et d'Alembert : si
converge, alors
converge également, et la limite supérieure de
est sa limite. Retenez donc qu'une série entière converge absolument sur son
disque de convergence. De plus la convergence est uniforme, sur tout
disque fermé inclus dans le disque de convergence.
Proposition 1Soit
une série entière, de rayon de convergence
. Soit un réel tel que .
t.q.
Démonstration : Elle utilise une majoration que nous avons déjà
rencontrée. Fixons tel que . Pour tout
:
où est un majorant de
(qui existe par définition
du rayon de convergence). Alors, pour tout complexe de module
inférieur ou égal à :
Cette majoration étant indépendante de , la convergence est
bien uniforme.